par bououkaz moez » Jeu 01 Déc 2005, 21:41
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Ronaldinho, le «Valaisan»
STAR Le Brésilien qui sera sans doute sacré Ballon d'or demain a joué quelques matches sous les couleurs du FC Sion. C'était en juniors C, il avait 13 ans. Souvenirs, souvenirs...
Quand, à la TV, ils voient Ronaldinho se lancer dans des arabesques, signer des buts venus d'ailleurs sous le mythique maillot de Barcelone, cela leur rappelle des souvenirs. Comme s'ils étaient revenus un peu plus de dix ans en arrière. «Quand, ici, il marquait un but, il avait le même sourire lumineux», raconte Jean-Jacques Papilloud.
Car le même Ronaldhino qui, à moins d'une énorme surprise, recevra cette semaine le Ballon d'or, récompense suprême, avait joué en 1993 quelques mois sous les couleurs du FC Sion, en juniors C. Il avait 13 ans à peine. Jean-Jacques Papilloud et son frère Didier étaient ses entraîneurs.
Bourreau applaudi
«Moi, je pourrais toujours me flatter d'avoir fait des passes de but au meilleur joueur du monde», rigole, pour sa part, Benjamin Lazo, qui était son meilleur ami. Ils jouaient les deux en attaque. Aujourd'hui, Benjamin évolue à Ayent, en 3e ligue...
Le week-end dernier, ils ont vu, à la TV, l'ex-junior réaliser un des exploits dont il a le secret. C'était lors du fameux «clásico», le duel féroce qui oppose toujours le Real Madrid au Barça. Au terme de rushes solitaires, Ronaldinho a signé deux buts qui ont assommé Madrid. Les supporters du Real, devant tant de talent, se sont pourtant levés pour applaudir leur bourreau.
Cette faveur, seul Maradona, sous le même maillot du Barça, y avait eu droit lors d'une précédente déconvenue madrilène. «Je n'aurais jamais imaginé que Real me réserve une telle ovation», a déclaré le Brésilien. Le Ballon d'or devrait récompenser celui qui, à chaque match, réinvente le foot, y met de la joie.
«La seule consigne que je lui donne est la suivante: «Fais ce que tu as envie», raconte Frank Rikjaard, l'entraîneur du «prince de Barcelone». «Petit, le ballon ne le quittait jamais. Au petit-déjeuner, il le tenait entre ses jambes. Sur le chemin de l'école, il le cachait sous le bras. Au lit, il l'appuyait contre sa tête», raconte Dona Miguelinha, sa mère. Un lob suivi d'une aile de pigeon et d'un tir croisé, ce but, marqué avec la Seleção contre le Venezuela, en 1999, l'avait fait connaître dans le monde entier. Depuis, il est devenu champion du monde et sa carrière européenne démarrée au PSG se poursuit dans l'un des seuls clubs à la mesure de son talent.
«Lui, il inventait tout»
C'était l'hiver 1993. Roberto Assis, son frère aîné devenu son manager aujourd'hui, illuminait le jeu du FC Sion et Ronaldinho était venu le rejoindre quelques mois dans le petit appartement que Roberto habitait au chemin des Collines. Son frère, son idole aussi. «Il a été mon soleil, je voulais devenir aussi fort que lui», répète souvent Ronaldinho.
En accompagant son frère à Tourbillon, Ronaldinho s'était naturellement mis à jouer avec les gosses de son âge. A la tête aujourd'hui de la sélection valaisanne des M14, les frères Papilloud étaient déjà des fous de foot. Responsable alors du mouvement juniors, Jean-Jacques, enseignant, se souvient d'avoir été frappé très vite par le talent du Brésilien.
«Dans les petits matches, il avait toujours le geste qu'on n'attendait pas. Les autres essayaient d'imiter ce qu'ils avaient vu à la TV. Lui, il inventait tout. Et il avait déjà ce sourire éclatant à chaque but, le même qu'aujourd'hui.»
Responsable des juniors C, Didier Papilloud, le frère, était son entraîneur direct. «Ce qui me fascinait chez lui, c'était son amour du ballon. Pour aller du vestiaire au terrain, les autres le prenaient sous le bras. Lui, il jonglait tout le long avec. L'entraînement fini, il restait pour tirer des coups francs. Toujours de bonne humeur, d'une infinie gentillesse.» L'entraîneur lui ayant obtenu une licence à Berne, Ronaldihno avait même joué quelques matches tout à fait officiels sous les couleurs du FC Sion. Historique. «Contre Vétroz, contre Bramois, notamment, à chaque fois, il avait cartonné.»
Du choc à l'épicerie
Employé dans un garage de Sion et joueur d'Ayent et pas du Barça, Benjamin Lazo jouait à ses côtés en attaque, et les deux coéquipiers étaient devenus les meilleurs amis du monde. «Un jour, contre Conthey, il avait mis huit goals à lui tout seul.» A l'époque, ils se voyaient presque tous les jours.
«Comme il n'allait pas à l'école, je savais où le retrouver dès la classe terminée. Il était toujours en train de jouer au ballon contre le mur du stand de tir. On allait s'acheter du chocolat à l'épicerie La Source, on jouait un peu au Nintendo, son autre passion. Et puis on faisait des matches l'un contre l'autre. Ça pouvait durer des heures.»
La seule chose que Ronaldinho détestait à l'entraînement, se souvient Benjamin, c'était les séances de condition physique. «Il traînait les pieds, il faisait semblant de devoir rattacher ses lacets pour pouvoir éviter un petit tour de terrain.» Baragouinant quelques mots de portugais, Benjamin était le seul de l'équipe à pouvoir parler un peu avec lui. «Il rêvait déjà de devenir pro, il en parlait tout le temps.»
Les trois Valaisans n'ont jamais revu, sinon à la télé, l'enfant prodige. Aujourd'hui, l'ex-copain de Benjamin est devenu l'une des stars les plus adulées, les mieux payées de la planète foot. Mais, à le voir si heureux après chaque but, ils sont persuadés qu'il n'a pas changé. C'est Paco Seiralo, le préparateur physique du Barça, qui déclarait récemment à son sujet: «Si on le laissait faire, il serait capable d'aller jouer au foot dans la rue avec les gosses. Pour moi, c'est une vraie star, mais qui ne se prend pas pour une star.» A chaque compliment, Rolandinho répond de la même façon. «Je suis juste un jeune capable de faire beaucoup mieux et d'apprendre encore beaucoup de choses à l'avenir.»
Jean-Jacques Papilloud s'apprête à aller assister sur place au prochain match du Barça contre Séville. Histoire de revoir, de près, le gosse le plus doué qu'il n'ait jamais eu sous son aile...
Bertrand Monnard
Le Matin
27.11.2005
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